Quelle reconversion pour les anciens hôpitaux et cliniques ?

Reconversion ancienne clinique Saint-Vincent de Paul Lyon

La reconversion de l'ancienne clinique Saint-Vincent de Paul dans le cadre du programme Oasis Parc à Lyon (©Guillaume Perret)

Temps de lecture : 6 min

Véritables morceaux de villes qui concentrent en un seul lieu bien des étapes de la vie, les hôpitaux et cliniques font de plus en plus l’objet de reconversions importantes pour correspondre aux normes en vigueur en matière de santé. Parfois, ces anciens hôpitaux à l’architecture souvent remarquable changent de fonction pour s’ouvrir à de nouveaux usages – logements, bureaux, commerces… Coup de projecteur sur des opérations chirurgicales à Dijon, Lyon et Versailles.

Plus qu’un bâtiment, un hôpital est un morceau de ville à part entière. « Chacun est amené au cours de sa vie à fréquenter l’hôpital, lieu qui a de ce fait une place particulière dans la mémoire collective », estiment Émilie Pascal et Julien Kostrzewa dans la revue des patrimoines In Situ. Par conséquent, « la reconversion, nécessaire à sa sauvegarde, est un sujet qu’il convient d’aborder avec délicatesse ». Cette « délicatesse » justement, VINCI Immobilier l’a fait sienne pour restructurer des hôpitaux et des cliniques historiques à l’architecture remarquable, afin de réintégrer ces lieux à la vie urbaine, tout en les ouvrant aux nouveaux usages.


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À Lyon notamment, les équipes de VINCI Immobilier ont réhabilité la clinique Saint-Vincent de Paul, un établissement datant du milieu du XIXe siècle qui était destiné aux femmes ayant des troubles alimentaires. « Tout en apportant une touche contemporaine grâce aux bâtiments neufs, il était essentiel de rénover ce patrimoine historique à l’identique », relate Marjorie Pontet, responsable de programmes chez VINCI Immobilier. Pour cette opération d’envergure baptisée Oasis Parc, le bâtiment central, la Maison neuve, le château d’eau et la serre ont ainsi été conservés. Tout comme le parc centenaire attenant aux 700 logements créés. « La biodiversité était au cœur de notre projet pour conserver la faune et la flore présentes sur le site, poursuit Marjorie Pontet. Pour la renforcer et offrir un cadre verdoyant aux habitants, nous avons planté plus de 274 arbres. »

Les défis liés à la reconversion d’anciens hôpitaux

Bien souvent, les centres hospitaliers – trop à l’étroit dans des édifices obsolètes – quittent peu à peu le cœur historique des villes pour se déployer dans cités hospitalières fonctionnelles. Ce choix opéré par la clinique Sainte-Marthe à Dijon en 2017 a permis à VINCI Immobilier, en co-promotion avec Edifipierre, de transformer le site emblématique niché rue de la Préfecture. « Les Dijonnais étaient particulièrement attachés à cette clinique, car elle hébergeait une maternité depuis des décennies », explique Gilles Toulon, directeur de programmes chez VINCI Immobilier. Initié dès 2015, ce projet de reconversion en logements et résidence Services Seniors a été livré. Si l’opération comprend des immeubles neufs, elle fait surtout la part belle à la rénovation de deux édifices historiques, dont le cloître, classés.

Le cloître de la clinique Sainte-Marthe réhabilité en logements pour étudiants et jeunes actifs (©Gilles Toulon)

Pour donner une seconde vie à ces lieux, les équipes de VINCI Immobilier ont dû relever plusieurs défis techniques. « Outre les travaux de désamiantage pour respecter les normes en vigueur et les fouilles archéologiques, nous avons conservé les structures historiques pour aménager des appartements », précise Gilles Toulon. Aujourd’hui, le site réhabilité comprend 203 logements – dont 95 dédiés à une résidence service pour seniors (Ovelia) et 52 à destination des jeunes –, le programme Courtille Sainte Marthe jouit de sa proximité immédiate avec les Halles de Dijon, espace dédié à la gastronomie et aux commerces de bouches. « Reconvertir cette ancienne friche hospitalière est un parfait exemple de la construction de la ville sur elle-même, à l’heure de l’urgence climatique et du zéro artificialisation nette des sols naturels », souligne Gilles Toulon. Nécessitant du temps long pour voir le jour, la reconversion de ces sites autrefois dédiés à la santé favorise aussi l’aménagement urbain des villes. « Avec la réhabilitation de la clinique Saint-Vincent de Paul à Lyon, nous avons participé à la création de la rue Chantal Sandrin qui borde Oasis Parc », confie Marjorie Pontet.

Soigner la biodiversité

À Lyon toujours, ADIM, filiale de VINCI Construction, et VINCI Immobilier sont à la tête d’un autre projet emblématique de reconversion : celui de la clinique Trarieux, dans le quartier Montchat, inoccupé depuis 2018. Identifiable par son style art-déco, cet ensemble à l’architecture remarquable, inauguré en 1935, va se réinventer sous le sceau des nouveaux usages, avec la création de 144 logements mixtes et intergénérationnels. « « En amont de ce dossier, il y a eu un travail important sur l’acceptabilité du projet auprès des riverains, avec l’initiation de journées portes ouvertes sur le site préalablement à l’obtention du permis de construire », précise Mathieu Boudou, responsable de programmes sur cette opération chez VINCI Immobilier. Remodeler ce morceau de ville obsolète auquel les habitants sont attachés nécessite obligatoirement de la pédagogie. « Plusieurs bâtiments annexes de la Clinique construits au fil des années et considérés comme dépréciatifs seront démolis, notre intervention permettra de retrouver l’édifice historique de la Mutualité Française et de lui donner une nouvelle vie. » Pour ce faire, un travail minutieux a été mené en amont sous le contrôle de l’Architecte des Bâtiments de France et de la ville de Lyon, notamment pour ajouter des balcons en façade.

L’ancien bâtiment de la clinique Trarieux à Lyon qui sera réhabilité (©Scenesis)

« À lui seul, l’édifice historique représente un véritable défi ! Nous avons dû composer avec une largeur de bâtiment inférieure à ce que nous retrouvons habituellement sur les bâtiments de logements neufs et nous avons adapté le dessin de nos logements avec une trame de façade propre à l’usage premier du bâtiment. Les appartements qui y seront aménagés seront particulièrement lumineux et offriront des surfaces habitables généreuses mais aussi de belles hauteurs sous plafond. » Parmi les autres promesses de ce projet : faire une place belle à la nature et aux espaces verts et agir pour la biodiversité. « L’imperméabilisation du site a été inversée. À terme, notre projet comportera 34% de surfaces imperméables contre 63% aujourd’hui », poursuit Mathieu Boudou. La flore locale du site sera complétée par la plantation de plus de 140 arbres ! « Des partenariats ont été noués avec l’Office National des Forêts et la Ligue de Protection des Oiseaux et les dispositions prévues permettront de classer le site « Refuge LPO ». Sur une période de dix ans, un écologue indépendant réalisera un suivi minutieux des mesures prises en faveur de la biodiversité.» Pour être dans les clous de l’économie circulaire, 90 % des déchets de l’opération de la clinique Trarieux seront valorisés grâce à l’outil Waste Marketplace du groupe VINCI.

Dentelle urbaine

Comme ses confrères de VINCI Immobilier, Mathieu Boudou estime que les promoteurs – épaulés par les architectes et les urbanistes –, sont les « seuls » acteurs de la fabrique la ville à pouvoir porter de A à Z ces opérations de reconversion d’anciens hôpitaux et cliniques. « Ce sont des projets qui demandent une grande technicité, de la patience et un savoir-faire unique, car nous réalisons de la dentelle urbaine sur-mesure avec une extrême précaution et de la délicatesse », confirme Gilles Toulon. Et Laurent de Malartic, architecte et directeur de projets au sein de l’agence Wilmotte & Associés, d’ajouter : « La préservation et la réhabilitation de cette typologie de patrimoine est primordiale. Nos anciens ont lutté pour sauvegarder ce patrimoine architectural pour les générations futures. À nous de leur redonner vie sous le prisme des nouveaux usages. »

La reconversion de l’ancien hôpital royal de Versailles, une référence


(©Frédéric Morel)

Parachevée en 2015, la reconversion de l’ancien hôpital royal de Versailles fait encore figure de référence auprès des acteurs de la fabrique de la ville. Désaffecté depuis la fin des années 90, cet édifice prestigieux de 28 000 mètres carrés datant du XVIIIe siècle –qui a pris feu à trois reprises –, a été réhabilité sous le coup de crayon de l’architecte Jean-Michel Wilmotte. « Le maire de Versailles s’est retrouvé avec un bâtiment remarquable sur les bras, mais abandonné par l’État et inopérant pour la santé ou toute autre activité », se remémore Laurent de Malartic, architecte et directeur de projets au sein de l’agence Wilmotte & Associés. Pour ramener de la mixité dans ce quartier versaillais, décision est prise d’associer une offre résidentielle classique à des logements étudiants, une crèche, un espace culturel et des commerces. En accord avec les architectes en chef des monuments historiques de l’agence 2BDM – Frédéric Didier et Christophe Batard –, certaines unités et bâtiments contemporains ont été démolis. « Ces derniers n’étaient pas respectueux de l’architecture versaillaise et de la beauté singulière des édifices historiques du lieu, dont la chapelle », précise Laurent de Malartic. Avec l’appui des paysagistes François Neveux et Bernard Rouyer, trois jardins publics aux identités différentes viennent magnifier cette pièce urbaine qui aura traversé le temps.